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In Nath

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lilirose14's avatar
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  Dans la petite maison de bois pourvue d’un jardin regorgeant de merveilles, se trouvait une jolie famille qui semblait issue d’un feuilleton gelévisée tant elle semblait fausse. Et pour cause, la petite famille Sadida était la famille parfaite, comme dans les livres. Le papa ayant pour nom Narcisse travaillait pour la justice en étant un juge haut placé dans la hiérarchie du célèbre tribunal où il punissait les criminels. La maman nommée Edelweiss était un véritable cordon bleu et une femme au foyer qui s’occupait avec amour de ses trois enfants… ou presque. Églantine, Oliver et Nath, étaient leurs noms. Églantine, l’ainée, avait de très beaux cheveux verts forêt, un beau visage et une voix d’or. Elle dessinait aussi très bien et avait un don avec les fleurs. Oliver montait très bien la dragodinde, était très intelligent et très costaud pour son âge. D’ailleurs, lui aussi était très beau garçon, avec ses magnifiques yeux. Mais il se trouvait une tache en cette belle famille. C’était la petite dernière. Nath était une enfant non souhaitée, l’erreur de la famille. Ses cheveux verts semblaient ternes comparés à ceux de sa fratrie, ses grands yeux chocolats n’étaient pas aussi beaux que ceux d’Oliver. Pourtant elle était sage et ne faisait jamais la moindre bêtise, au plus grand soulagement de la petite famille. Qu’elle ne se fasse pas remarquer ! Voici son point de vue de sa vie, de son elle-intérieur. De tous ce qu’ils ignorent et ce qu’elle sait.

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  Je suis une petite fille sage. Toujours prudente, jamais impolie. Je marche sur la pointe des pieds pour ne déranger ni rien ni personne et pour que l’on oublie de m’observer. Tout le monde est rassuré de me voir sourire sans faire aucun bruit de salive, en me tortillant gentiment les doigts. Personne ne sait que je suis une petite fille sage… comme un orage.
Personne, sauf moi.
Quand je me tais, que je regarde les gens me regarder, je pense à tout ce qu’il ignore et que je sais.

  Personne ne sait que dans l’ombre de mes yeux marron, la nuit, pousse une forêt d’arbre et de muloups. Des muloups verts dans les branches. Des muloups roux le long des troncs. Quand ils sortent leurs dents luisantes, c’est effrayant sous la lune. Alors je les combats courageusement avec la poudre à faire mourir de rire. Ou bien avec des baisers ; c’est moi qui choisis et c’est toujours moi qui gagne. Si par malheur un muloup s’échappe, gare à lui ! Je finirai bien par l’enfermer à nouveau dans sa sombre forêt.

 Personne ne sait non plus que, le jour, dans la lumière de mes yeux, je cache un grenier lumineux. J’y lave et relave mes souvenirs dans une petite cuvette bleue. J’y fais sécher mes ennemis de la journée. Très souvent, dans mon grenier, je repasse aussi mes parents et ma fratrie. Minutieusement. Dans l’armoire, bien pliés, ils prennent moins de place que quand ils me méprisent et me crient après dans la salle à manger ! Et si un muloup se permet de me poursuivre jusqu’ici, je l’aplatis comme un gant de toilette !

  Sous le lit de mon grenier, c’est un vrai délice. Un immense jeu d’échec bariolé y sert de tapis. Personne ne l’a jamais Sali. Moi, pieds nus, je saute d’une case jaune et en l’air, je rencontre un rat qui joue de la flûte. Quand je me pose sur une case rouge, je vois le Roi, la Reine et la tour former un trio de banjo. Et si par hasard, je croise le muloup aplati, je le change en clafoutis ! En fait, tout ce qui me plaît vole dans l’air de mon grenier : fer à repasser, hydravion, toboggan, assiette à dessert et petite cuillère…

  Personne n’a jamais vu non plus le bateau mort qui dort au fond de l’eau de mes yeux. Il dort pour toujours en comptant le temps qui passe jusqu’à l’infini. Sans s’arrêter et sans respirer :
138, 139, 140…
Sur l’étrange plage où il a échoué, les sirènes sont en rocher. Les bancs de sardines, immobiles. Et les vagues, plus sèches qu’un grain de sel. Les muloups ne sont pas assez fous pour fouler ce sable-là ! Et moi, je ne suis pas pressée de voir les gens qui un jour peut-être m’aimeront s’y allonger. Ce bateau mort me fait trop froid.
141, 142, 143…

  Personne ne peut s’en douter ! Près de mon cœur, il y a un minuscule pommier sur une table de chevet. Il ne fleurit jamais pour, comme moi, ne pas se faire remarquer. Sous ses racines qui forment comme une cave voûtée, je cache mon musée-jardin. Tous les gens, tous les animaux qui, qu’un jour peut-être m’aimeront sortent des tableaux quand je chuchote « c’est moi ! » Il marche simplement (ou rampent, ou nagent, ou volent) et pour la première fois, on me trouve belle. Même le muloup qui a osé me suivre jusqu’ici. Les cactus me caressent les cheveux et quand je murmure « c’est nous ! » une pluie presque tiède tombe doucement sur mon visage. Je la goûte pendant que mes fleurs poussent en silence.

  Alors là ! Personne ne peut approcher. C’est interdit de regarder par la fenêtre de mon pommier ! Il s’y déroule de drôles d’histoires. Je deviendrais rouge comme une pomme si quelqu’un les voyait ! Je ne peux rien dire, rien raconter. Et c’est interdit de m’y obliger. Le derniers muloup qui a essayé d’entrer n’en ressortira jamais ! Il ne pourra rien révéler !
Désolée : pommier secret.

  Un peu plus au fond de moi, il y a une boîte rouge. Dans cette boîte rouge, il y a une petite montre aux aiguilles rouges. Dans cette montre, il y a un théâtre avec une scène derrière un rideau rouge et dans la salle, un seul siège présent juste pour moi : un grand fauteuil très rouge.
Souvent, je m’habille en chevalier, je monte sur la scène et aussitôt je cours m’enfoncer dans mon fauteuil et me regarde jouer. Je me dépêche d’aller me changer, je m’habille en fée, en louve, en Chaperon rouge, je remonte sur la scène puis je cours m’enfoncer dans ce fauteuil trop grand pour moi et me regarde à nouveau. Je me trouve stupide et incapable. Je me demande bien qui je suis !

  Dans les coulisses de ce théâtre, encore plus au fond, tout au fond de moi, il y a une bibliothèque fermée à clef. Et dans cette bibliothèque se trouve un livre parfaitement blanc. C’est entre ses pages que je me cache chaque soir pour me mettre en colère. Contre les voleurs, les guerriers, les menteurs, ma famille parfaite… contre moi. Ou contre le muloup. Je hurle plus fort que lui et je deviens une petite fille en rage comme le plus terrible des orages. J’attrape le muloup par le dos et le renvoie au fin fond de sa sombre forêt. Je saisi un sabre et coupe qui je veux en deux, en dix, en mille. Je frappe avec mes pieds. Je froisse les méchants, je déchire les monstres et je pleure sans honte.

  Je me recoiffe. Je sors et referme la porte à clef. Je remonte l’escalier, mets mon costume de petite fille sage, toujours prudente, jamais impolie. Je souris au Roi, à la Reine, à la Tour et aux sirènes, sans faire aucun bruit de salive, en me tortillant gentiment les doigts. Puis je dis bonjour à ma famille qui me méprise et que je repasserai certainement dans mon grenier, qui je joue aux échecs avec ma vie. Je marche sur la pointe des pieds pour ne déranger ni rien ni personne. Sagement, je regarde ces gens qui font semblant de me regarder, je pense à tout ce qu’ils ignorent et que je sais. Ça me plaît.

  Je me réveille à Bonta, il est huit heure du soir, j’ai dormi tout le jour je sais qu’on est quelques milliards à chercher le bonheur. Je souris, je vais bien m’amuser car ici rien n’a de sens, car on n’est que des pions contents d’être à genoux, car j’ai depuis longtemps perdu mes rêves, je connais trop la danse. Il ne me reste que trois choses. Papa, le voyage, et la mer. Pour les autres, je n’existe pas, mais c’est peut-être mieux comme cela. Demain partira Joris pour ce nouveau monde qui n’attend que moi. Qui sait, si je ferme les yeux, je vivrais peut-être vieille… dans ma forêt… dans mon grenier… sur le bateau mort… près de mon cœur et dans mon pommier… dans le théâtre… avec des souvenir de voyage dans ma bibliothèque… et papa avec la mer tout près de mon cœur.
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Avi-the-Avenger's avatar
I like this! Really gives us a feel of the character!